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De nouvelles perspectives pour mieux vivre avec le TDAH

Véronique Parent, psychologue
Neuropsychologue auprès des jeunes et professeure titulaire à l’Université de Sherbrooke. Sa recherche porte sur la pleine conscience, le TDAH et les difficultés d’apprentissage.

 

 

Chaïma Meneceur
Détenant le titre de neuropsychologue en France, elle poursuit un doctorat en psychologie à l’UQAM, où elle se spécialise dans les troubles neurodéveloppementaux chez l’enfant.


Les conséquences du TDAH sur le fonctionnement quotidien, sur le plan aussi bien social que familial, scolaire ou occupationnel, nécessitent la mise en place d’interventions efficaces. Le traitement du TDAH est multimodal et combine la pharmacothérapie et des interventions non pharmacologiques (CADDRA, 2020). En plus des interventions éducatives et psychosociales déjà bien établies en tant qu’approches non pharmacologiques, les interventions dites centrées sur « le corps et l’esprit » (Mind-Body Therapy), comme les interventions basées sur la pleine conscience, le yoga et l’activité physique, suscitent un intérêt croissant dans la communauté scientifique.

La pleine conscience
La pleine conscience est généralement définie comme la capacité à porter attention aux expériences qui émergent dans le moment présent, sans les juger ni tenter de les modifier. Elle s’oppose à l’automaticité, à la répétitivité, à l’impulsivité et au manque de conscience émotionnelle (Kabat-Zinn, 2003). La pleine conscience aide à développer des compétences d’autorégulation telles que le contrôle de l’attention et la régulation des émotions. Pour ce faire, l’individu est invité à se concentrer de manière non réactive sur les stimuli internes (comme les pensées) ou externes (comme les objets et les sensations), tandis que les réactions automatiques sont diminuées (Bishop et al., 2004). La pleine conscience regroupe donc des éléments centraux du TDAH, dont l’attention, l’impulsivité et la régulation émotionnelle. Les interventions basées sur la pleine conscience sont le plus souvent offertes dans un format de groupe et durent typiquement de 8 à 10 semaines. La littérature scientifique montre que ces interventions contribueraient à l’amélioration des capacités de pleine conscience ainsi qu’à la diminution des symptômes du TDAH (voir notamment Olivia et al., 2021), avec des effets plus importants sur les symptômes d’inattention chez les jeunes plus âgés et les adultes (Lee et al., 2022). Ces résultats pourraient potentiellement s’expliquer par le fait que la pleine conscience contribuerait davantage à l’amélioration de l’attention, et que les symptômes d’inattention deviennent souvent prédominants à mesure que l’individu progresse en âge. Les jeunes plus âgés et les adultes pourraient également avoir plus de facilité à intégrer et à utiliser ce qu’ils ont appris dans l’intervention. Par ailleurs, plusieurs études se sont intéressées aux effets des interventions basées sur la pleine conscience sur d’autres variables comme les fonctions exécutives, l’anxiété ou les comportements internalisés et externalisés ; il reste toutefois difficile de tirer des conclusions claires quant à ces effets. Il en est de même pour les effets des interventions basées sur la pleine conscience à court/moyen/long terme, qui sont encore méconnus (Lee et al., 2022 ; Poissant et al., 2019).

Le yoga
Le yoga vise à harmoniser le corps et l’esprit dans le but, notamment, d’améliorer la concentration (Gonzales et al., 2023). Il englobe un ensemble de postures, d’exercices de respiration régulée et de méditation (Birdee et al., 2017). C’est pourquoi il est souvent associé dans les études aux interventions basées sur la pleine conscience ou à la méditation. Diverses revues systématiques soulignent les effets bénéfiques du yoga sur la santé physique et mentale des adultes (par exemple, Büssing et al., 2012). De même, chez l’enfant, Miller et ses collaborateurs (2020) ont montré les effets positifs du yoga sur les problèmes externalisés et internalisés, les compétences sociales, les fonctions exécutives et le fonctionnement physiologique (pression artérielle et rythme cardiaque). Les exercices de respiration seraient particulièrement utiles pour réduire les comportements d’hyperactivité et la distraction chez les personnes ayant un TDAH. D’après une récente revue systématique incluant 10 études, le yoga et la méditation ont été associés à une diminution des symptômes du TDAH chez les enfants, notamment en ce qui concerne l’inattention et l’hyperactivité-impulsivité (Gonzales et al., 2023). Il a été remarqué que ces pratiques ont également des effets bénéfiques sur des difficultés associées (telles que l’anxiété et une faible estime de soi) ainsi que sur la dynamique familiale lorsque les parents y participent.

L’activité physique
L’activité physique se définit par des mouvements corporels qui augmentent le rythme cardiaque, accélèrent la respiration et entraînent une dépense énergétique. Ses bienfaits sur les symptômes du TDAH sont reconnus à court terme, avec des changements transitoires immédiats après une seule séance, ainsi qu’à long terme, avec des changements durables résultant d’entraînements répétés (Suarez-Manzano et al., 2018). L’activité physique constitue une approche holistique qui favorise l’attention et diminue l’hyperactivité et l’impulsivité (Cornelius et al., 2017). Ses effets positifs s’étendent également à d’autres aspects fréquemment associés au TDAH, tels que les capacités exécutives, les compétences sociales et scolaires ainsi que les symptômes anxio-dépressifs (voir par exemple Belair et al., 2018). Cependant, dans la littérature, les résultats sur les effets observables de l’activité physique sont variables, notamment en raison de facteurs tels que l’intensité, le type ou la durée de l’exercice. Malgré l’absence de consensus sur la prescription de l’exercice, une durée moyenne de 30 minutes à une intensité modérée s’est révélée particulièrement efficace pour réduire les symptômes du TDAH (Zhu et al., 2023). Les exercices aérobiques comme la course à pied, la natation ou le cyclisme ont été précisément associés à l’amélioration des fonctions exécutives, tandis que les activités de coordination semblent plus bénéfiques aux capacités attentionnelles (Chan et al., 2022 ; Ludyga et al., 2017).

Les études portant sur les effets des interventions basées sur la pleine conscience, du yoga et de l’activité physique montrent des résultats prometteurs pour l’amélioration du bien-être des personnes présentant un TDAH. Ces résultats restent toutefois partiels, au sens où les limites des études réalisées jusqu’à ce jour restreignent les conclusions pouvant en être tirées. Ces limites incluent principalement l’utilisation d’échantillons de petite taille et l’absence de groupe témoin, qui empêchent de distinguer les effets du passage du temps des effets de l’intervention. Les études doivent mieux documenter les paramètres des interventions en matière de contenu, de composantes ou de processus impliqués, de durée et d’intensité. Il importe également d’inclure des mesures de suivi après la cessation des interventions et de préciser les caractéristiques des individus qui les abandonnent. De nouvelles études employant des devis méthodologiques plus rigoureux permettront, on le souhaite, dans un avenir rapproché, de mieux comprendre les effets réels de ces nouvelles perspectives dans le contexte du TDAH.

Bibliographie 

  • Belair, M. A., Kohen, D. E., Kingsbury, M. et Colman, I. (2018). Relationship between leisure time physical activity, sedentary behaviour and symptoms of depression and anxiety: Evidence from a population-based sample of Canadian adolescents. BMJ Open, 8(10), article e021119. https://doi.org/10.1136/bmjopen-2017-021119
     
  • Birdee, G. S., Ayala, S. G. et Wallston, K. A. (2017). Ross-sectional analysis of health-related quality of life and elements of yoga practice. BMC Complementary and Alternative Medicine, 17, 83. https://doi.org/10.1186/s12906-017-1599-1
     
  • Bishop, S. R., Lau, M., Shapiro, S., Carlson, L., Anderson, N. D., Carmody, J., Segal, Z. V., Abbey, S., Speca, M., Velting, D. et Devins, G. (2004). Mindfulness: A proposed operational definition. Clinical Psychology: Science and Practice, 11(3), 230-241. https://doi.org/10.1093/clipsy.bp
     
  • Büssing, A., Michalsen, A., Khalsa, S. B. S., Telles, S. et Sherman, K. J. (2012). Effects of yoga on mental and physical health: A short summary of reviews. Evidence-based Complementary and Alternative Medicine, 2012, article 165410, 7. https://doi.org/10.1155/2012/165410
     
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  • Gonzalez, N. A., Sakhamuri, N., Athiyaman, S., Randhi, B., Gutlapalli, S. D., Pu, J., Zaidi, M. F., Patel, M., Atluri, L. M. et Arcia Franchini, A. P. (2023). A systematic review of yoga and meditation for attention-deficit/hyperactivity disorder in children. Cureus, 15(3), article e36143. doi : 10.7759/cureus.36143.
     
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  • Ludyga, S., Brand, S., Gerber, M. et Pühse, U. (2017). An event-related potential investigation of the acute effects of aerobic and coordinative exercise on inhibitory control in children with ADHD. Developmental Cognitive Neuroscience, 21-28.
     
  • Miller, S., Mendelson, T., Lee-Winn, A., Dyer, N. L. et Khalsa, S. B. S. (2020). Systematic review of randomized controlled trials testing the effects of yoga with youth. Mindfulness, 11, 1336-1353. https://doi.org/10.1007/s12671-019-01230-7
     
  • Oliva, F., Malandrone, F., Di Girolamo, G., Mirabella, S., Colombi, N., Carletto, S. et Ostacoli, L. (2021). The efficacy of mindfulness-based interventions in attention-deficit/hyperactivity disorder beyond core symptoms: A systematic review, meta-analysis, and meta-regression. Journal of Affective Disorders, 1(292). 475-486. doi : 10.1016/j.jad.2021.05.068.
     
  • Poissant, H., Mendrek, A., Talbot, N., Khoury, B. et Nolan, J. (2019). Behavioral and cognitive impacts of mindfulness-based interventions on adults with attention-deficit hyperactivity disorder: A systematic review. Behavioural Neurology, 2019, article 5682050. https://doi.org/10.1155/2019/5682050
     
  • Suarez-Manzano, S., Ruiz-Ariza, A., De La Torre-Cruz, M. et Martínez-López, E. J. (2018). Acute and chronic effect of physical activity on cognition and behaviour in young people with ADHD: A systematic review of intervention studies. Research in Developmental Disabilities, 77, 12-23.
     
  • Zhu, F., Zhu, X., Bi, X., Kuang, D., Liu, B., Zhou, J., Yang, Y. et Ren, Y. (2023). Comparative effectiveness of various physical exercise interventions on executive functions and related symptoms in children and adolescents with attention deficit hyperactivity disorder: A systematic review and network meta-analysis. Front Public Health, 11, article 1133727. https://doi.org/10.3389/fpubh.2023.1133727