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L’autorisation légale d’exercer pour l’étudiant et pour le candidat au permis : les obligations du superviseur

Stéphane Beaulieu, psychologue et secrétaire général de l'Ordre des psychologues du Québec - sbeaulieu@ordrepsy.qc.ca


Nous avons écrit dans le numéro de septembre 2015 au sujet des dispositions permettant à l’étudiant en psychologie (doctorant) ou au candidat au permis par voie d’équivalence (candidat à l’admission) d’exercer certaines activités réservées sous supervision. Dans la présente chronique, nous élaborerons la question davantage quant aux responsabilités du superviseur dans le cas où l’étudiant occupe un emploi pendant ses études ou lorsque le candidat à l’équivalence occupe un emploi pendant qu’il complète les exigences de l’Ordre pour l’accès au permis.

Rappelons qu’il s’agit ici de l’application du Règlement sur certaines activités professionnelles pouvant être exercées par des personnes autres que des psychologues et par des psychologues, en particulier de la portion qui prévoit :

Lorsqu’il agit hors du cadre d’un programme d’études, d’un stage ou d’une formation, un étudiant ou un candidat à l’admission qui possède les connaissances et les habiletés nécessaires peut exercer les activités professionnelles que peuvent exercer les psychologues dans le cadre d’un emploi à la condition qu’il les exerce sous supervision et dans le respect des normes réglementaires applicables aux psychologues relatives à la déontologie ainsi qu’à la tenue des dossiers et des cabinets de consultation. Cette personne doit également être inscrite au registre tenu à cette fin par l’Ordre.

Lorsque l’étudiant ou le candidat au permis s’inscrit au Registre des étudiants et des candidats à l’admission de l’Ordre des psychologues du Québec, le superviseur appose sa signature sur le formulaire de demande d’inscription et il s’engage à :

  • avoir préalablement évalué les connaissances et les habiletés du doctorant ou du candidat à l’admission relativement aux activités professionnelles qui lui seront confiées;
  • s’assurer que le doctorant ou le candidat à l’admission respectera les normes réglementaires applicables aux psychologues en matière de déontologie, de tenue de dossiers et en ce qui a trait aux cabinets de consultation.

À partir de quand le doctorant ou le candidat à l’admission peut-il occuper un emploi sous supervision? L’Ordre n’a pas fixé de seuil minimal de formation aux fins de déterminer si un doctorant ou un candidat à l’admission est apte à exercer des activités sous supervision dans le cadre d’un emploi. Une évaluation doit être effectuée par le superviseur au cas par cas selon le cheminement et la progression de chaque étudiant ou candidat.

Certaines balises sont à considérer par le superviseur au moment de prendre la décision de confier l’exercice d’une ou de plusieurs activités réservées à un doctorant ou à un candidat à l’admission dans le cadre d’un emploi. À titre indicatif, les compétences professionnelles prévues au Manuel d’agrément de l’Ordre, en particulier les compétences « évaluation », « intervention », « relations interpersonnelles », et « éthique et déontologie », peuvent servir de base à une telle évaluation.

De façon générale, il est attendu qu’un minimum de formation théorique doive déjà faire partie du bagage du doctorant ou du candidat à l’admission avant qu’on lui confie certaines responsabilités concernant les activités réservées. Il en va de même pour la formation pratique. Un étudiant qui n’a pas terminé un premier stage pourrait difficilement exercer des activités professionnelles portant sur les compétences « évaluation » et « intervention » sans nécessiter un ratio « heures contact-client » vs « heures de supervision » très élevé ; ce qui suppose que le milieu de travail permet un accès régulier et soutenu au superviseur.

L’évaluation et l’intervention

L’évaluation est au coeur des activités cliniques du psychologue et est une activité à haut risque de préjudice. Nous avons établi que le doctorant ou le candidat à l’admission a déjà acquis des éléments de formation théorique liés à la compétence « évaluation » et qu’il a déjà amorcé sa formation pratique. Malgré cela, le superviseur doit évaluer le niveau de connaissance et d’habiletés de chaque supervisé en portant une attention particulière aux méthodes d’évaluation et à la psychopathologie. Parmi différentes interventions que peuvent exercer les psychologues, la psychothérapie est une activité qui comporte aussi un haut risque de préjudice. Le superviseur devra avoir évalué le niveau de connaissances du supervisé quant aux différents modèles théoriques d’intervention, en particulier celui privilégié dans l’offre de services, de même que ses habiletés à planifier une intervention, à la mettre en oeuvre et à en évaluer l’effet.

Relations interpersonnelles et éthique et déontologie

Comme mentionné précédemment, les compétences « relations interpersonnelles » et « éthique et déontologie » font partie intégrante des actions du psychologue. À cet égard, le Manuel d’agrément de l’Ordre exige que les notions théoriques liées à la compétence « relations interpersonnelles » aient été acquises avant le début de l’internat, soit généralement avant ou consécutivement aux stages. Ces connaissances devraient donc idéalement avoir été acquises avant que le doctorant ou le candidat occupe un emploi. Le superviseur devra évaluer les capacités du supervisé en ce qui a trait aux habiletés de communication, de contact et d’écoute. Il devra aussi avoir minimalement évalué les connaissances du supervisé en matière d’alliance thérapeutique et de « relations de pouvoir ».

Le Manuel d’agrément prévoit aussi que le cours Éthique et déontologie doit avoir été suivi précédemment ou consécutivement au premier stage. Le fait d’avoir suivi et réussi le cours portant sur l’éthique et la déontologie est un prérequis quasi incontournable.

Consultation et supervision

La consultation n’est pas une activité réservée. Toutefois, le superviseur doit encadrer le supervisé lorsque celui-ci doit donner un avis à un tiers concernant une des activités réservées. En ce qui a trait à la compétence « supervision », si l’étudiant ou le candidat à l’admission doit superviser une activité réservée dans le cadre de son emploi (ce qui est plutôt rare), un encadrement est également nécessaire.

Conclusion

Le superviseur qui s’engage à superviser un étudiant ou un candidat à l’admission doit avoir comme premier intérêt la qualité du service offert à la clientèle. Il doit toujours évaluer le niveau de connaissances et d’habileté du supervisé en fonction des problématiques rencontrées. Il est logique de s’attendre à ce que le doctorant ou le candidat à l’admission ait déjà suivi avec succès certains cours liés aux compétences professionnelles. Puisque l’évaluation de troubles mentaux, l’évaluation de troubles neuropsychologiques et la psychothérapie sont les activités les plus couramment exercées dans un tel contexte, une attention particulière doit être portée aux compétences « évaluation » et « intervention », sans toutefois négliger les compétences « relations interpersonnelles » et « éthique et déontologie ».