L’autorisation légale d’exercer pour l’étudiant et pour le candidat au permis
Stéphane Beaulieu, psychologue et secrétaire général de l'Ordre des psychologues du Québec - sbeaulieu@ordrepsy.qc.ca
Depuis 2012, dans la foulée de l’adoption du projet de loi 21, l’exercice de certaines activités est réservé à certains professionnels. Pour exercer les activités réservées, il faut détenir un permis délivré par un ordre professionnel et aussi, dans certains cas, une attestation de formation, elle aussi émise par un ordre. L’exercice de la psychothérapie, l’évaluation des troubles mentaux et l’évaluation des troubles neuropsychologiques sont au nombre des activités qui sont désormais réservées au sens de la loi.
Il va de soi que l’encadrement légal de certaines activités ne doit pas empêcher les étudiants en psychologie et les candidats au permis de psychologue par voie d’équivalence (candidats à l’admission) de se former. Le Code des professions permet aux ordres professionnels d’autoriser par règlement certaines personnes qui ne sont pas détentrices de permis ou d’une attestation délivrée par un ordre professionnel à exercer les activités réservées dans un cadre particulier et selon certaines conditions. À ce titre, l’Ordre des psychologues a adopté en 2012 un règlement qui s’intitule : Règlement sur certaines activités professionnelles pouvant être exercées par des personnes autres que des psychologues et par des psychologues.
L’étudiant en psychologie
Dans le cadre des stages et de l’internat en psychologie, l’étudiant exerce nécessairement certaines activités professionnelles réservées alors qu’il ne détient pas encore un permis de psychologue. C’est ce règlement qui l’autorise à exercer ces activités, sous supervision. Voici comment le règlement définit « l’étudiant » : Un étudiant inscrit à un programme d’études en psychologie peut exercer, parmi les activités professionnelles que peuvent exercer les psychologues, celles qui sont requises aux fins de compléter ce programme, à la condition qu’il les exerce sous supervision et dans le respect des normes réglementaires applicables aux psychologues relatives à la déontologie ainsi qu’à la tenue des dossiers et des cabinets de consultation et qu’il remplisse l’une ou l’autre des conditions suivantes :
- le programme d’études en psychologie auquel il est inscrit conduit à l’obtention d’un diplôme donnant ouverture au permis délivré par l’Ordre des psychologues du Québec;
- le programme d’études en psychologie auquel il est inscrit conduit à l’obtention d’un diplôme en psychologie délivré par un établissement d’enseignement situé hors du Québec équivalant à celui d’un programme de doctorat québécois.
Cette dernière disposition vise spécifiquement les étudiants inscrits dans un programme de psychologie d’une université à l’extérieur du Québec qui font un stage au Québec dans le cadre de leur programme d’études (on pense ici aux échanges internes universitaires et interétablissements).
Notons que dans le cas d’un étudiant inscrit à un programme universitaire préparatoire à l’exercice de la profession de psychologue, l’Ordre n’a pas à être informé de l’identité de la personne qui exerce les activités réservées. Il relève de la responsabilité des établissements d’enseignement, des milieux de stage et des superviseurs de s’assurer que l’étudiant est bel et bien inscrit dans un programme de psychologie professionnelle. L’Ordre peut faire des vérifications au besoin.
Le candidat à l’admission par équivalence
Le règlement permet aussi à une personne formée à l’extérieur du Québec en psychologie, qui est en processus d’obtention de son permis au Québec par la voie des équivalences, d’exercer les activités réservées lorsque l’Ordre lui impose de suivre un stage aux fins de l’obtention du permis. Voici comment le règlement définit un « candidat à l’admission » :
La personne qui doit compléter un stage ou une formation aux fins de la reconnaissance d’une équivalence conformément au Règlement sur les normes d’équivalence de diplôme et de formation aux fins de la délivrance d’un permis de l’Ordre des psychologues du Québec peut exercer, parmi les activités professionnelles que peuvent exercer les psychologues, celles qui sont requises aux fins de compléter la formation ou le stage qui lui permettrait de bénéficier d’une équivalence, à la condition qu’elle les exerce sous supervision et dans le respect des normes réglementaires applicables aux psychologues relatives à la déontologie ainsi qu’à la tenue des dossiers et des cabinets de consultation.
Occuper un emploi
Dans son règlement, l’Ordre a aussi prévu des conditions permettant à l’étudiant ou au candidat à l’admission d’occuper un emploi où il aurait à exercer des activités réservées pendant ses études ou pendant qu’il satisfait aux exigences d’équivalence. Voici ce que le règlement stipule :
Lorsqu’il agit hors du cadre d’un programme d’études, d’un stage ou d’une formation, un étudiant ou un candidat à l’admission qui possède les connaissances et les habiletés nécessaires peut exercer les activités professionnelles que peuvent exercer les psychologues dans le cadre d’un emploi à la condition qu’il les exerce sous supervision et dans le respect des normes réglementaires applicables aux psychologues relatives à la déontologie ainsi qu’à la tenue des dossiers et des cabinets de consultation. Cette personne doit également être inscrite au registre tenu à cette fin par l’Ordre.
Dans un tel contexte, l’inscription au Registre des étudiants et des candidats à l’admission de l’Ordre des psychologues du Québec est obligatoire. L’Ordre consigne ainsi des informations au sujet de la personne qui exerce les activités, au sujet de son superviseur ainsi que du lieu où les activités sont exercées.
La réglementation ne fixe pas de durée de temps pour qu’un étudiant ou un candidat à l’admission puisse se prévaloir de cette disposition et ainsi occuper un emploi. Il est toutefois clair qu’une telle mesure doit être temporaire pendant que l’étudiant fait ses études doctorales ou pendant que le candidat à l’admission par équivalence complète les exigences de l’Ordre dans le délai qui lui a été prescrit. En ce qui a trait aux étudiants, il relève de la prérogative des départements universitaires d’instaurer un cadre incitant l’étudiant à ne pas prolonger indûment la durée de son parcours doctoral sous prétexte qu’il occupe un emploi. Au moment de l’adoption de ce règlement, l’intention de l’Ordre était de permettre aux étudiants qui ont notamment contracté des dettes d’études de pouvoir commencer à gagner un certain revenu et de rendre une main-d’oeuvre qualifiée accessible à la population, et non pas de ralentir le processus de fins d’études ni l’accès au permis. Rappelons que cette mesure ne s’applique plus lorsque l’étudiant est diplômé. Il doit alors obtenir son permis de psychologue s’il souhaite exercer.
L’exigence d’être à l’emploi et sous supervision
Rappelons que ce règlement ne vise pas à permettre à un étudiant ou à un candidat à l’admission l’exercice autonome de la profession ni une pratique autonome supervisée. Ainsi, l’étudiant ou le candidat à l’admission n’est pas autorisé à recevoir sa propre clientèle ou à ouvrir son propre cabinet. Il doit être employé notamment par un psychologue (qui agit comme superviseur ou qui lui en désigne un) ou par un organisme, par exemple une commission scolaire ou un établissement du réseau qui lui désigne alors un superviseur. « Être employé par » peut signifier que l’étudiant ou le candidat soit salarié contractuel ou perpermanent ou encore qu’il soit lié par contrat à titre de travailleur autonome (aux fins de l’impôt). Toutes les activités doivent être réalisées sous la supervision d’un professionnel autorisé.
En ce qui a trait aux reçus pour les honoraires professionnels pour des services offerts en privé, le reçu doit être signé par le psychologue superviseur et doit mentionner explicitement que les services ont été donnés par le supervisé sous sa supervision. Le nom du supervisé doit apparaître sur le reçu, ainsi que son titre. Rappelons que les étudiants et les candidats à l’admission ne sont pas autorisés à utiliser le titre de psychologue. Ils doivent s’identifier comme stagiaires ou internes en psychologie ou comme doctorants en psychologie. Enfin, le stagiaire ou le candidat n’est pas autorisé à délivrer des reçus en son nom propre.
Dans une perspective de protection du public, un élément central de ce règlement repose sur le fait que le superviseur assume la responsabilité de surveiller et d’encadrer les activités de l’étudiant ou du candidat à l’admission et d’intervenir au besoin auprès de la clientèle. Le superviseur doit évaluer le niveau d’autonomie, de connaissances et d’habiletés du supervisé en fonction des clientèles rencontrées et du niveau de complexité des problématiques à évaluer ou à traiter et ajuster son niveau de supervision selon les différentes situations.
Le psychologue superviseur est tenu de conserver les dossiers professionnels et d’y donner accès au besoin.
La responsabilité professionnelle
Quant à la responsabilité professionnelle, le programme d’assurance de l’Ordre, accessible par l’entremise du courtier Bernard et Fabien en vertu du Règlement sur l’assurance de la responsabilité professionnelle des membres de l’Ordre des psychologues du Québec, couvre les étudiants et les candidats à l’admission qui sont employés par un psychologue dûment inscrit au tableau de l’Ordre et qui a souscrit à cette assurance. Dans un tel contexte, l’étudiant n’a pas à souscrire lui-même à cette assurance. Il est couvert automatiquement sur la police à laquelle le psychologue a adhéré. Lorsque le psychologue superviseur travaille pour un établissement qui offre une couverture d’assurance responsabilité professionnelle, il doit s’assurer que les termes contractuels de cette assurance couvrent l’étudiant ou le candidat à l’admission. Dans le cas contraire, l’étudiant ou le candidat doit souscrire au programme de l’Ordre.
Conditions pour agir à titre de superviseur
Le superviseur doit être membre de l’Ordre et, le cas échéant, être habilité à exercer les activités professionnelles qu’il supervise et posséder un minimum de deux années d’expérience pratique dans le domaine de pratique visé par le programme de formation, par le stage, par l’internat à compléter ou par l’emploi occupé, s’il est titulaire d’un doctorat, et un minimum de six années d’expérience s’il est titulaire d’une maîtrise.
Une personne qui est membre d’un ordre professionnel autre que l’Ordre des psychologues peut être superviseure si elle est habilitée à exercer les activités professionnelles qu’elle supervise, si sa compétence et son expérience sont équivalentes à celles exigées du superviseur membre de l’Ordre et si une relation de coopération active et continue est établie entre cette personne et le responsable des activités de formation pratique pour le compte de l’université ou de l’Ordre.
Le superviseur ne doit pas avoir fait l’objet, au cours des trois années précédant la supervision, d’une décision lui imposant un cours ou un stage de perfectionnement ni d’une décision rendue par un ordre professionnel, un conseil de discipline ou le Tribunal des professions ayant eu pour effet de le radier, de limiter ou de suspendre son droit d’exercer des activités professionnelles.
Sur demande, le superviseur transmet à l’Ordre les coordonnées de l’étudiant ou de la personne qu’il supervise ainsi que les modalités de supervision qui lui sont applicables.
Précisons qu’en cas de signalement en lien avec la conduite d’un étudiant ou d’un candidat à l’admission dans le cadre des services professionnels rendus, l’Ordre enquêtera auprès du superviseur.
L’activité d’évaluation des troubles neuropsychologiques
Enfin, certaines dispositions du règlement portent spécifiquement sur l’évaluation des troubles neuropsychologiques, pour les psychologues qui se forment en cours de carrière en vue d’obtenir l’attestation émise par l’Ordre pour l’évaluation des troubles neuropsychologiques. Voici ce que le règlement prévoit :
Le psychologue peut évaluer, dans le cadre de la formation prévue au Règlement sur une activité de formation des psychologues pour l’évaluation des troubles neuropsychologiques, les troubles neuropsychologiques sous supervision, dans la mesure où l’exercice de cette activité est requis pour lui permettre de compléter cette formation. Le superviseur doit être membre de l’Ordre des psychologues du Québec, être habilité à exercer l’activité d’évaluation des troubles neuropsychologiques et posséder une expérience professionnelle dans l’exercice de cette activité.
Nous espérons que ces informations seront utiles à la compréhension des différentes modalités d’application de ce règlement. Les personnes intéressées peuvent communiquer avec le secrétariat général de l’Ordre pour tout complément d’information.